Thierry Gauthier, une partie des Piscines de Romain s'en est allée avec toi 😢
Hier, j’ai appris une nouvelle qui m’a profondément touché : la disparition de Thierry. Thierry faisait partie de l’histoire des Piscines de Romain, mais aussi de ma vie. Ce qui rend cette nouvelle encore plus bouleversante, c’est que j’ai appris qu’il était décédé le 21 juin, le jour même où je l’avais déposé chez lui, à 6 heures du matin, après 10 heures de route de nuit et cinq jours intenses sur un chantier qu'il était venu m'aider à terminer à Vannes.
Aux alentours de 11h00, il m’avait envoyé un message pour me dire qu’il venait de se réveiller et qu’il voulait savoir si j’étais bien rentré. Nous avons échangé quelques messages, puis plus rien… Il n’a jamais répondu. Ce genre de comportement n’était pas inhabituel chez Thierry : il avait l’habitude d’apparaître et de disparaître, parfois pendant de longs mois. Mais il finissait toujours par réapparaître. Alors, sur le moment, je ne me suis pas trop inquiété.
Hier, en pensant à lui, je lui ai envoyé un message. " Je me fais beaucoup de souci pour toi Thierry "Puis, par curiosité, je suis allé voir son profil Facebook. C’est là que j’ai découvert un message“Thierry, tu vas nous manquer.” J’ai cherché davantage, et sur Google, une simple ligne m’a frappé en plein cœur : “Monsieur Thierry Gauthier est décédé le 21 juin 2024 à 60 ans .”
Une ligne. C’est tout ce que j’ai trouvé. Une date, rien d’autre. Pas un mot sur qui il était, sur sa vie, sur ce qu’il a accompli. Pas d’histoire. C’est comme si Thierry était parti dans l’anonymat, comme si tout ce qu’il avait été se résumait à une date.
Et ça, je ne peux pas l’accepter.
Thierry n’était pas parfait, mais il était bien plus qu’une ligne sur Google. Il était un travailleur acharné, un homme généreux, sensible, et loyal. Il faisait partie de ma vie, de mon histoire, de l’histoire des Piscines de Romain. Alors aujourd’hui, je veux écrire cet article pour lui rendre hommage. Pour que son histoire reste gravée. Pour que, si un jour, sa petite-fille décide de chercher qui était son grand-père, elle ne tombe pas sur une ligne froide et impersonnelle, mais sur des mots vrais, sincères, racontés par quelqu’un qui l’a connu, qui a partagé des moments forts avec lui, et qui avait beaucoup d’admiration pour l’homme qu’il était.
Thierry, c’était le gars qui revenait toujours. Celui qui disait “oui” à n’importe quel défi. Celui avec qui j’ai posé des centaines de piscines. Celui qui faisait partie de ma vie depuis 2013.
Il était bien plus qu’un simple employé. Il avait ses défauts, comme nous tous. Oui, il parlait trop. Oui, il pouvait être maladroit ou dire des choses qu’il ne pensait pas. Mais il était toujours là. Quand j’étais dans une galère, il accourait. Quand il n’allait pas bien, il revenait vers moi. Et on repartait toujours de l’avant.
Sur la route pour Vannes, pendant ces longues heures de trajet, Thierry m’a rappelé toutes les anecdotes que nous avions vécues ensemble. Il avait les yeux qui brillait, nous en avons rigolé, y en avait des dizaines, toutes plus dingues les unes que les autres. Certaines me revenaient vaguement, d’autres beaucoup plus clairement.
Comme cette fois sur l’île de Ré, où nous faisions le terrassement d’une piscine de 11 par 4, juste tous les deux. On y avait passé la journée, et, épuisés, on arrive enfin au dernier coup de mini-pelle. Et là, en plein dans l’angle, on tombe sur une énorme cavité, un trou immense : un ancien tunnel de contrebande. Je me souviendrai toujours de son regard, stupéfait, abêté. Et puis, alors que 99 % des gens auraient paniqué ou perdu leur sang-froid, Thierry et moi, on a éclaté de rire. C’était sûrement nerveux, mais ça reflétait notre façon d’être. On avait cette capacité à transformer une galère en éclat de rire, à ne jamais se laisser abattre. On a trouvé une solution, comme toujours, mais cette anecdote, elle est gravée en moi. Elle symbolise notre parcours.
Je me souviens aussi de cette fois où, en plein mois de Février, je l’ai appelé à 18h00 pour une piscine à poser en urgence à Lausanne ( Suisse ) le lendemain matin à 08h00. Il m’a répondu simplement : « On part quand ? » Une demi-heure plus tard, on était en route. À minuit on était devant chez le client ou on a dormi dans la voiture, un froid glacial, et à 8 heures du matin, on était prêts pour tout donner. Le soir, la piscine était installée. et tout le monde étaient heureux. C’était ça, Thierry : toujours prêt à relever un défi.
Thierry était aussi un homme d’une extrême fragilité, malgré les apparences. Je m’en souviens comme si c’était hier, ce jour de janvier 2024 où il est venu me voir, après une grosse dispute qui nous avait éloignés pendant plusieurs mois. Ce même Thierry, qui, six mois auparavant, avait pris parti pour des personnes qui me diffamaient sur TikTok. J’avais ressenti une profonde blessure à ce moment-là, un mélange de déception et d’incompréhension. Mais en janvier, tout cela s’est effacé lorsqu’il est revenu à mon bungalow, en larmes.
Il était là, comme un enfant de 60 ans, les lèvres tremblantes, les yeux rougis, et une détresse dans le regard qui m’a frappé en plein cœur. Entre deux sanglots, il m’a dit qu’il n’avait personne d’autre à qui parler, que j’étais le seul en qui il pouvait avoir confiance. Ces mots, je ne les oublierai jamais. Ils résumaient tellement bien qui il était : un homme sensible, souvent perdu, qui parfois se trompait, mais qui au fond avait un cœur énorme.
Dans la vie, rien n’est jamais tout blanc ou tout noir. Il faut apprendre à composer avec ce que l’on nous offre, à voir les forces et les faiblesses de chacun pour ce qu’elles sont. Thierry n’était pas parfait, mais qui l’est ? Ses défauts faisaient partie de lui, comme les nôtres font partie de nous. J’ai compris qu’en travaillant aussi longtemps avec quelqu’un, il faut l’accepter dans son entièreté, avec ses contradictions et ses maladresses, mais aussi avec ses qualités. Et des qualités, Thierry en avait tellement.
Je choisis de ne retenir que cela : sa gentillesse, sa disponibilité sans limite, son courage à affronter ses démons, et sa capacité à toujours revenir, même après des tempêtes. Ces moments-là, ce qu’il a partagé avec moi, resteront gravés à jamais. Thierry m’a appris que la tolérance, c’est parfois simplement regarder l’autre avec humanité et comprendre qu’au-delà de ses faiblesses, de ses doutes et des blessures enfouies au plus profond de lui, il y a une âme qui cherche à avancer, à sa manière, malgré le poids de son histoire. Ce jour-là, face à lui, j’ai eu cette certitude, presque palpable, qu’il était terriblement marqué par un cruel manque de confiance en lui. Une fragilité qui transparaissait dans chacune de ses paroles pendant ces deux heures où il s’est confié à moi.
Pendant ces deux heures, je l’ai écouté, attentivement, sans jugement. J’ai essayé de le conseiller avec toute la sagesse dont j’étais capable, pour lui donner un peu de réconfort et de force. C’est ce jour-là que j’ai vraiment compris. Sa fragilité, sa gentillesse, et sa sensibilité débordante étaient autant de qualités qui faisaient de lui un homme bon, mais qui le rendaient aussi vulnérable. Et ce manque de confiance en lui, c’est sans doute ce qui, parfois, pouvait le pousser à dire des bêtises. Mais au fond, Thierry n’a jamais été méchant. Jamais.
J'ai un tas d'anecdotes et je pourrais en raconter pleins d’autres. Ce sont des souvenirs, des moments que j'aime revivre en silence. Je vais poster quelques vidéos de chantiers où Thierry apparaît, pour lui rendre hommage. Mais le reste, je préfère les garder pour moi.
Ces cinq derniers jours passés ensemble sur le chantier de Vannes avaient un goût particulier. Cela faisait des années que Thierry et moi n’étions pas partis en mission, juste tous les deux. Et pourtant, quand j’ai été en galère sur ce chantier, sans savoir à qui demander de l’aide, c’est à lui que j’ai pensé. Je lui ai demandé, et il n’a pas hésité une seule seconde. “Je viens”, m’a-t-il dit, simplement, comme si c’était une évidence.
Pendant ces cinq jours, c’était comme si rien n’avait changé. On a roulé des heures, travaillé sous le soleil, partagé des rires et des confidences. Il m’a parlé de sa petite-fille et de son fils, de ses rêves. On a refait le monde, comme on savait si bien le faire.
Le 21 juin à 6h00 du matin, je l’ai déposé chez lui, fatigué, mais heureux de ce que l’on avait accompli ensemble. Je ne savais pas que ce serait notre dernière aventure. Je ne savais pas qu’il nous quitterait le jour même.
Aujourd’hui, je pleure Thierry, mais je célèbre aussi tout ce qu’il était. Ses failles, ses qualités, ses maladresses, sa générosité. Il était courageux, sensible, et surtout, incroyablement humain.
Hier j’ai immédiatement appelé les “vrais” des Piscines de Romain. Roger, Kevin, mon père et moi, on est tombés d’accord. Thierry, c’était un coquin mais surtout un bosseur, un gentil, un homme avec un cœur énorme.
Alors, Thierry, où que tu sois, je veux que tu saches une chose : je ne garderai que le bon. Les galères, les disputes, ça n’a jamais eu d’importance à mes yeux. Ce qui reste, c’est toi, ton sourire, tes histoires, ta loyauté.. Tes collègues et moi, on s’accorde à dire que tu étais un super pisciniste et que tu nous a tous marqué !
Et à ceux qui lisent ces lignes, je veux dire une chose, une seule : aimons-nous vivant. Ne laissons pas les regrets prendre le dessus. Disons à ceux qu’on aime qu’on les aime, avant qu’il ne soit trop tard.
Bonne route, Thierry. Tu vas me manquer.
Romain
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